Le samedi 18 mars 2023, Paul et Véronique ont présenté leurs derniers coups de coeur lors de la troisième Matinale de la Médiathèque ! Deux beaux fils rouges reliaient l'ensemble des documents présentés : la musique et les civilisations autochtones !
Paul a commencé par nous présenter Résister en dansant de Kimberly Blaeser (2020), aux éditions des Lisières, une petite maison d’édition fondée en 2016 qui propose des recueils de poésie contemporaine.
Kimberly Blaeser est une autrice amérindienne du Minnesota et sa poésie nous raconte avec délicatesse une histoire triste : celle des Amérindiens aux Etats-Unis et au Canada. Une histoire dont il ne nous reste d'habitude que des westerns et des clichés... Mais Résister en dansant nous rappelle que la lutte amérindienne contre l’acculturation et la domination continue ! Sa poésie réactive la mythologie amérindienne et nous emmène dans la nature majestueuse de l’Amérique du Nord. Les textes rendent hommage aux résistants passés et contemporains et revivifient la vie quotidienne dont chaque moment et geste sont l’occasion d’actions de grâces.
A ensuite été présenté Le chant des pistes (1987) de Bruce Chatwin. Dans ce récit de voyage, nous suivons le narrateur qui à travers son périple en Australie, nous fait découvrir un des aspects de la culture aborigène : leur chant, à la fois cartographie, carte d’identité et arbre généalogique. Tissant des liens entre les différentes cultures et les différents voyages et lectures qu’il a faits, interviewant des scientifiques aux quatre coins du globe, le narrateur offre un récit entrainant, érudit et émouvant sur les origines de l’Humanité. Un livre fascinant, à la croisée de l’essai, du conte et du récit de voyage.
À noter qu'un film documentaire réalisé par Werner Herzog, Sur les pas de Bruce Chatwin, est sorti en 2019. De plus, du 4 avril au 2 juillet a lieu musée du Quai Branly une exposition sur le chant des pistes du désert australien !
Paul a clos la présentation de ses coups de coeurs avec le roman 555 d'Hélène Gerstern (2022) qui débute avec la découverte d’une partition de Scarlatti, compositeur du XVIIIe siècle, par Grégoire, ébéniste chargé de restaurer un étui de violoncelle. Son associé Giancardo, luthier, joueur invétéré et endetté auprès de personnes peu recommandables se demande si cette partition pourrait l’aider à améliorer sa situation précaire. Les deux artisans vont présenter à la célèbre claveciniste Manig Terzian cette partition pour l’authentifier mais peu après la partition disparaît lors d'un cambriolage. C'est alors que tout le monde de la musique et le microcosme autour de Scarlatti se met en branle, musicologues, musiciens, collectionneurs se lancent à la recherche de cette mystérieuse partition qui pourrait constituer la 556ème sonate de Scarlatti !
Ce roman choral, se lit comme un polar et nous plonge tour à tour dans la psyché de cinq personnages, dont le point commun est d’être lié intimement à la musique de Scarlatti. Chacun d'entre eux court après la partition et essaie de prévoir et deviner les faits et gestes des autres. Une véritable partie d'échecs qui suscite notre curiosité avant de nous happer : on ne lâche plus le roman avant la dernière page et la conclusion de l’énigme.
Les personnages nous sont sympathiques ou antipathiques – agaçants voire insupportables – mais ce qui nous les rend intéressants, ce qui les sauve même à nos yeux, c’est cette quête portée par leur amour pour la musique. Chacun d'eux représente une facette du monde musical : interprète, compositeur, universitaire, collectionneur, luthier... Car un intérêt supplémentaire de ce roman est de nous plonger dans l’univers de la musique : son fonctionnement, son économie, ses lieux à travers le monde, ses comportements, la passion des luthiers et des musiciens pour leurs instruments et leurs compositeurs fétiches, leur patience et leur abnégation devant un violon à restaurer, un morceau à jouer etc...
C’est enfin une invitation à découvrir Scarlatti et à se plonger dans sa musique. Ce compositeur du XVIIIe siècle qui, comparé à Haendel ou Bach, nous apparait à nous profanes comme un illustre inconnu, est en réalité un musicien important, toujours joué et même remixé par des DJ contemporains !
Au tour de Véronique, qui a commencé par nous présenter La symphonie des arbres, documentaire réalisé par Hans Lukas Hansen, sorti en 2021. Ce film parle d’un luthier allemand installé à Crémone, en Italie. Gaspar Borchardt, rêve de fabriquer un violon exceptionnel, digne des célèbres violons Stradivarius. Pour cela il se lance dans la quête d’un arbre très rare multicentenaire qui se trouverait dans les forêts de Bosnie. En effet cet arbre serait constitué d’un bois exceptionnel qui permettrait la réalisation du violon de ses rêves. Commence alors une incroyable expédition afin de tenter de réaliser ce projet.
Ce film se regarde comme un film d’aventure avec une intrigue, du suspense, des moments d’émotion et des personnages hors du commun. Il nous fait également profiter de beaux extraits musicaux avec notamment la très talentueuse violoniste néerlandaise Janine Jansen, à qui Gaspar Borchardt destine le violon qu’il veut fabriquer. Ce film met en valeur ces hommes et femmes de l’ombre que sont les luthiers, qui mettent tout leur talent dans la fabrication d’instruments que d’autres feront sonner et mettront ainsi en lumière.
Nous avons ensuite découvert l'album Song of songs, composé par Patrick Hawes en 2009. C’est le 3ème album de ce compositeur, chef d’orchestre, pianiste et organiste britannique. Song of songs est un ensemble de 6 œuvres chorales pour cordes et voix. Le texte, écrit par le frère du compositeur, Andrew Hawes, est basé sur la collection de poèmes d’amour qui forment le Cantique des Cantiques de l’Ancien Testament. Ces textes expriment toutes les émotions ressenties par celui qui aime, le désir, l’espoir, la confusion, la joie, avec un langage de l’amour à la fois sensuel et spirituel.
La musique est très évocatrice de la joie et de l’espoir. On entend une chanteuse soliste soprano colorature, Elin Manahan Thomas, dont la voix s’envole dans les aigus de façon impressionnante, comme un ange qui s’élèverait sur le tapis sonore du chœur. Le compositeur a utilisé cette catégorie de voix très spécifique pour composer une musique très aérienne, très pure et qui dégage beaucoup d’émotion.
Et finalement, Véronique nous a parlé du film Le sixième enfant réalisé par Léopold Legrand, sorti en 2022. Le film retrace l’histoire d’une rencontre entre un couple d’avocats, joué par Sara Giraudeau et Benjamin Lavernhe, et un ferrailleur et son épouse, joués par Damien Bonnard et Judith Chemla. Le premier couple n’arrive pas à avoir d’enfant. Le deuxième en a cinq et attend le sixième. En grande difficulté financière, les parents de la famille nombreuse proposent un « arrangement » au couple d’avocats…
Même si le propos de départ peut sembler choquant au premier abord, on s’attache finalement à chacun des quatre personnages et on se laisse porter par cette histoire de désir d’enfant face à la morale et à la loi. Léopold Legrand, dont c’est le premier film, a réalisé ce film avec justesse, sans jugement et sans aller dans le pathos. C’est un film poignant et brillamment interprété par son quatuor d’acteurs, notamment par la touchante Sara Giraudeau.
Les lecteurs et les lectrices de la Médiathèque ont aussi été nombreux et nombreuses à nous présenter leurs coups de coeur, que vous trouverez ci-dessous :